Aller au contenu principal

1898

publie l'article de Zola "J'accuse" dans "L'Aurore", publie "Les plus Forts"* et "Au Pied du Sinaï"**

Le 19 octobre 1897, Clemenceau quitte le journal La Justice pour L’Aurore. Presque aussitôt, le journal se trouva célèbre par l’affaire Dreyfus et il devint bientôt le centre de la campagne Dreyfusarde. De la à dire qu’il avait été fondé pour cela, il n’y avait qu’un pas. Il fut franchi au mépris de la vérité. Clemenceau n’était pas favorable à Dreyfus. Il avait cru, comme à peu près tout le monde, à sa culpabilité. Clemenceau publia donc, le 25 décembre 1894, un article sur la «trahison» de Dreyfus qu’il qualifiera plus tard de cruel et qu’il placera loyalement, en guise de préface, en tête des articles qu’il écrivit à l’Aurore pour la révision du procès Dreyfus et la réhabilitation de l’accusé.

 

Il fut renseigné par son ami de jeunesse Scheurer-Kestner, ainsi que Arthur Ranc et Bernard-Lazare sur les «illégalités» et les «huis clos» qui aboutirent à l’arrestation, puis à la condamnation et à la déportation d’Alfred Dreyfus sur la communication d’une pièce dont l’accusé, ni son défenseur, n’avaient eu aucune connaissance. Du jour où il comprit, Clemenceau décida de lutter chaque jour pour la réparation de l’illégalité puis pour la découverte de la vérité (5)

 

Il ne fut pas seul dans ce combat où l’action de Zola fut décisive. Le 13 janvier 1898, Emile Zola le plus connu des écrivains de l’époque, signe un grand article intitulé «Lettre ouverte au président de la République», Félix Faure. Clemenceau trouve le titre J’accuse et l’Aurore le publie avec un titre en lettres énormes. Le tirage du jour atteint les 300 000 exemplaires et «l’affaire» lancée.

 

Clemenceau écrira 665 articles qui furent publiés chez Stock en 7 volumes:

L’iniquité (1899) du 1er novembre 1897 au 20 juillet 1898: 162 articles

Vers la réparation (1899) du 21 juillet 1898 au 11 décembre 1898: 135 articles

Contre la Justice (1900) du 12 décembre 1898 au 31 mars 1899: 102

Des Juges (1901) du 1 avril au 11 mai 189: 40 articles

Justice militaire (1901) du 12 mai 1899 au 22 août 1899: 83 articles

Injustice militaire (1902) du 23 août 1899 au 16 décembre 1899: 78 articles

La Honte (1903) du 24 septembre 1899 au 3 novembre 1901: 65 articles (4)

 

*«Les plus forts»

Ce roman de Clemenceau parut d’abord dans l’Illustration (21 août au 4 décembre 1897), avec des dessins de Jeanniot. Roman conçu d’abord sous la forme d’une pièce qui fut achevée plus tard et faillit être jouée au Théâtre de Vaudeville. (5)

L’histoire est relativement simple: le marquis Henri de Puymaufray (son manoir ressemble singulièrement à l’Aubraie) après avoir «vécu brillamment» s’est retiré dans sa propriété. Il avait connu le grand amour avec Claire, épouse de l’industriel Dominique Harlé et Claude était née de cet union. Le père légal -qui ne sait pas- veut lui faire épouser un aristocrate, le vrai père, un explorateur. S’y greffe -heureusement- une histoire sociale. Clemenceau dénonce les conditions des ouvriers dans la papeterie de Harlé mais pour le pessimisme de Clemenceau, il est «normal» que les plus forts gagnent même s’ils sont les plus méchants et qu’une jeune fille de la bonne société préfère le «brillant» aux valeurs. Il est normal que les ouvriers grévistes soient vaincus... car ils ne doivent pas utiliser de violence.

 

En trame, on voit apparaître les signes précurseurs de la grande déchirure qui s’opérera entre le Clemenceau - l’ancien chef de l’extrême gauche et l’aile active révolutionnaire du mouvement ouvrier français.(4)

 

**«Au pied du Sinaï», paraît chez l’éditeur Fleury avec des illustrations de Henri de Toulouse-Lautrec. Sortir un ouvrage dont le titre reprend le nom de «Sinaï» (Le Baron Sinaï roman antisémite haineux de Gyp, paru en 1897) aurait pu entacher sérieusement l’image de l’auteur. Il n’en fut rien, au contraire. Ecrit par un dreyfusard actif et convaincu, l’ouvrage ne manifeste nulle ambiguïté dans son fond et sa forme(...) Pour Clemenceau, une religion ne définit pas un homme. Ce postulat de départ est essentiel pour comprendre son raisonnement. Partant de là, il y a des riches, il y a des pauvres et ceux-ci peuvent être mahométans, chrétiens, juifs (...) De ce fait, l’association race, religion et classe sociale est une ineptie. (...) Ces principes étant établis, le discours de Clemenceau est libre, et lorsqu’il trace le portrait d’un grand capitaliste juif, il dénonce non pas le juif mais le riche. La déshumanisation du capitalisme est un thème récurrent dans l’œuvre de Clemenceau comme l’est la dénonciation de la misère (1)

Les objets